Le 13 novembre 2017, l’Italie a vu s’envoler ses derniers espoirs de participer à la Coupe du Monde de la FIFA, Russie 2018™. Le quadruple champion du monde (1934, 1938, 1982 et 2006) a manqué l’épreuve pour la première fois depuis 1958. La Nazionale s’est alors engagée dans un tunnel dont elle a vu le bout le 14 mai 2018, lorsque Roberto Mancini a été nommé sélectionneur. Fort d’un bagage et d’un palmarès garnis dans le football européen, le technicien de 53 ans avait pour objectif d'ouvrir à sa sélection de nouveaux horizons. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a honoré sa mission. Les champions d’Europe en titre restent sur 36 matches sans défaite (27 victoires, 9 nuls), ce qui leur a permis de battre le record de 35 de deux sélections historiques : le Brésil champion du monde en 1994, entre 1993 et 1996 ; et l’Espagne entre 2007 et 2009, une équipe qui avait remporté une Coupe du Monde et deux UEFA EUROS. À ce jour, Mancini a dirigé 41 rencontres. Il ne s’est incliné que sur deux de ses cinq premières rencontres : en amical face à la France en juin 2018 et contre le Portugal en Ligue des Nations de l’UEFA en septembre de la même année. C’est là qu’a débuté la série d’invincibilité en cours de 36 matches, dont voici quelques clés.

L’Italie a longtemps été associée au catenaccio mais Mancini a voulu casser les codes. Dès sa prise de fonctions, il a adopté un 4-3-3 auquel il est resté fidèle. En 41 matches, son équipe a inscrit 93 buts, soit une moyenne supérieure à deux par match. Et ce n’est pas tout. En procédant à quelques ajustements au niveau de la transition défensive, l’Italie a parfois surpris par sa manière de presser et d’acculer ses adversaires. Mancini ajoute intensité et volonté de créer le danger dans la surface adverse à la traditionnelle solidité défensive italienne, laquelle a été reflétée par les 1 168 minutes sans but encaissé. Mieux que le record historique de Dino Zoff (1 143 minutes).

Le talent est un ingrédient essentiel aux yeux de Roberto Mancini et il n’hésite pas à récompenser en sélection un joueur qui en est pourvu. L’ancien entraîneur de Manchester City a convoqué près de 80 joueurs qui, dans leur immense majorité, ont eu du temps de jeu.

"Si tu le mérites, tu auras ta chance en équipe nationale." Voilà comment pourrait être résumé le message que Mancini envoie à tous les joueurs italiens, leur signifiant bien que les portes sont ouvertes. En l’absence de grandes stars, comme dans d’autres sélections, tous les candidats savent qu’ils joueront s’ils le méritent et que la force de la Squadra Azzurra réside dans son collectif.

L’un des défis les plus complexes de Mancini à son arrivée était de redonner espoir à des joueurs encore sous le choc de leur absence à Russie 2018. Son premier travail a été de prouver que cette déception pouvait être transformée en ambition pour les compétitions suivantes. Le deuxième a été de s’appuyer sur des jeunes prometteurs qui ont apporté la fraîcheur, le culot et l’envie dont semblait manquer l’Italie de 2018. Aujourd’hui, la Squadra Azzurra fonctionne car les joueurs croient au projet de Mancini et font preuve d’une grande solidarité lors de chacun de leurs rassemblements. "Nous ne pourrons jamais oublier la défaite contre la Suède mais ces dernières années, on est arrivés à transformer cette déception en enthousiasme", confiait Giorgio Chiellini aux médias en amont de l’entrée en lice de son équipe à l'UEFA EURO 2020. Et son acolyte Leonardo Bonucci d’ajouter : "Ce projet est en train de prendre forme : on a de l’enthousiasme, du talent, de la jeunesse et de l’expérience."

Pour remonter le moral des troupes après le camouflet face à la Suède en 2017, le technicien a misé sur l’enthousiasme et le plaisir. Dans l’approche des matches, cela s’est traduit par des joueurs libérés, prêts à prendre du plaisir et décidés à tenter des choses. Le football entreprenant et spectaculaire mis en place par Mancini a redonné du plaisir au plus expérimentés et s’est parfaitement adapté aux jeunes promesses. Il s’agissait du moment idéal pour tenter ce virage, comme il l’a confié à FIFA.com au moment de disputer l’EURO. "J’ai toujours essayé d’inculquer cette philosophie offensive aux équipes que j’ai entraînées. Parfois cela fonctionne, d’autres pas, mais c’était le bon moment pour offrir à nos supporters une sélection qui propose un football attractif." Pari gagnant. En trois ans et demi, il a transformé le visage et la mentalité d’une Italie qui fait désormais figure de favorite, quel que soit son adversaire.

L’Italie de Mancini ne s’est pas contentée d’établir un record d’invincibilité. Il y a deux mois à peine, elle a décroché son deuxième sacre européen en battant l’Angleterre lors de la finale de Wembley. Elle mène également la danse dans le Groupe C des qualifications européennes pour Qatar 2022 et, si elle reste sur ces bases, elle se présentera à la Coupe du Monde avec le statut de favorite. Mancini et ses hommes en sont conscients : ils ont les moyens de marquer l’histoire l’an prochain.