jeudi 07 avril 2022, 03:00

Cinq entraîneurs néophytes se frottent à l'élite

  • Au moins 17 entraîneurs fêteront leur baptême du feu mondialiste à Qatar 2022

  • Quatre champions du monde seront dirigés par un nouveau technicien

  • Gros plan sur cinq des parcours les plus marquants

Sur les 29 sélections déjà qualifiées pour la Coupe du Monde de la FIFA, Qatar 2022, 17 seront dirigées par des techniciens qui connaîtront leur première expérience mondialiste. Gros plan sur cinq d'entre eux.

Lionel Scaloni, l'expert débutant

À Allemagne 2006, Lionel Messi et Lionel Scaloni étaient coéquipiers dans la sélection argentine conduite par José Pekerman. Le premier incarnait la magie et le second la stabilité dans l'effectif du Professeur. Les deux Lionel se retrouvent 16 ans plus tard en Coupe du Monde, mais cette fois, Scaloni dirige l'équipe dont Messi assure le capitanat.

Scaloni a pris les commandes de l'Argentine après le douloureux épisode de Russie 2018, où, sous la houlette de Jorge Sampaoli, l'Albiceleste a peiné pour franchir la phase de groupes, avant de quitter le tournoi en huitièmes de finale. Après le départ de Sampaoli, dont il était l'adjoint, Scaloni a accepté de le remplacer par intérim.

À la tête d'un formation privée de trophées depuis près de 30 ans, Scaloni s'est lancé dans son premier mandat d'entraîneur principal avec un courage qui a payé. Il a gagné la Copa América 2021, terminé les qualifications sud-américaines en deuxième position et enchaîné 31 matches sans défaite. Au Qatar, il tentera de mettre fin à 36 ans de vaches maigres sur la scène mondiale.

Lionel Messi et Lionel Scaloni fêtent le triomphe de l'Argentine en Copa América

Rigobert Song, le phénix camerounais

Les résultats du Cameroun dans la Coupe d'Afrique des Nations organisée sur ses terres ont entraîné le limogeage du Portugais Toni Conceição à un peu plus d'un mois du barrage contre l'Algérie. Face à l'imminence de la confrontation, la Fédération présidée par Samuel Eto’o a confié les commandes à une ancienne gloire de la sélection, Rigobert Song.

Joueur le plus capé du Cameroun, avec 137 sélections entre 1993 et 2010, le défenseur, qui a notamment évolué à Liverpool et à West Ham, a été le pilier incontournable d'une équipe qui a vécu un âge d'or sous son capitanat.

Après la spectaculaire qualification des Lions Indomptables aux dépens de l'Algérie, Song fera ses débuts mondialistes sous la casquette d'entraîneur à Qatar 2022. En tant que joueur, il a pris part à États-Unis 1994, France 1998, Corée/Japon 2002 et Afrique du Sud 2010. Il est le troisième Camerounais comptant le plus d'apparitions dans l'épreuve avec neuf matches, derrière François Omam-Biyik (11) et Roger Milla (10).

Hospitalisé en octobre 2016 à la suite d'un accident vasculaire cérébral, Song s'est remis de façon quasi miraculeuse, malgré un pronostic sombre et deux jours de coma. Le Qatar sera donc une célébration de son retour. Les Lions Indomptables se rendront au Moyen-Orient dans l'intention de rééditer l'épopée de leurs aînés jusqu'en quart de finale d'Italie 1990.

Le sélectionneur du Cameroun Rigobert Song après la qualification aux dépens de l'Algérie

John Herdman, un débutant à part

L'Anglais John Herdman s'est pris de passion pour le ballon rond à Mexique 1986, après avoir assisté aux exploits de Diego Maradona face aux Trois Lions. "Je me souviens d'avoir vu Diego jouer contre l'Angleterre avec mon père. C'est là que je suis tombé amoureux du football".

Il s'est tourné vers la direction technique dès ses 16 ans. Après un séjour au Brésil pour s'imprégner de nouvelles méthodes d'entraînement, il revient dans sa ville natale de Consett, où il fonde une école fréquentée par de nombreux jeunes qui intègrent l'académie de Sunderland. Ses liens avec le centre de formation conduisent à son recrutement par le club anglais.

En 2001, il franchit une étape supplémentaire en rejoignant le programme de football de la Nouvelle-Zélande. En 2006, il prend la direction de la sélection féminine, qu'il qualifie pour deux Coupes du Monde et les Jeux Olympiques de Pékin 2008. En 2011, le Canada fait appel à lui pour diriger son équipe féminine, qui avait déçu lors de la phase finale 2011. Après avoir mené les Canucks en quart de finale de la Coupe du Monde sur leur sol en 2015, il est nommé à la tête de la sélection masculine.

Herdman aborde son poste avec l'intention de révolutionner le football dans le pays. Il se fixe un premier objectif ambitieux, auquel ses joueurs eux-mêmes ne croient pas : qualifier le Canada pour Qatar 2022. Mais il réussit à construire une équipe forte, tactiquement flexible pour s'adapter à ses différents adversaires et truffée de talents, qui finira en tête des qualifications devant le Mexique et les États-Unis.

Herdman sera le premier entraîneur de l'histoire à avoir dirigé une équipe féminine et masculine en Coupe du Monde. Hissé au rang de héros national, il tentera de créer la surprise au Qatar avec un Canada déjà assuré de sa qualification pour l'édition 2026.

Hansi Flick, d'adjoint à sélectionneur en Coupe du Monde

En 1996, alors qu'il termine sa carrière de milieu de terrain au Victoria Bammental, Flick occupe la double fonction de joueur et d'entraîneur. Il est ensuite recruté par Hoffenheim, à l'époque relégué dans les catégories régionales, avec lequel il entame une ascension fulgurante vers la Bundesliga.

Limogé en novembre 2005, il fait un bref passage en tant qu'adjoint au Red Bull Salzbourg avant de rejoindre le staff de Joachim Löw. Après le sacre de l'Allemagne à Brésil 2014, il prend le poste de directeur sportif de la Fédération allemande jusqu'en janvier 2017.

Deux ans plus tard, il rendosse le rôle d'adjoint pour épauler Niko Kovac au Bayern Munich. À la suite du départ de Kovac en novembre 2019, Flick est nommé entraîneur principal d'abord par intérim, puis à titre officiel en raison des bonnes prestations de son équipe. Sous sa férule, la formation bavaroise s'adjuge sept trophées dans l'un des cycles les plus prolifiques de son histoire : deux Bundesliga, une Ligue des champions, une Coupe du Monde des Clubs, une Coupe nationale, ainsi que les Supercoupes d'Allemagne et d'Europe.

Élu meilleur entraîneur d'Europe, il aspire à retrouver la Nationalmannschaft, cette fois en tant que sélectionneur. La démission de Löw dans le sillage des mauvais résultats à Russie 2018 et dans le dernier UEFA EURO ouvre la porte à sa nomination. Flick insuffle son mental de battant à la sélection qui se qualifie pour le Qatar en remportant huit des neuf matches disputés. Pour son premier mandat sur le banc en Coupe du Monde, il voudra entrer dans l'histoire en égalant Jupp Derwall, le dernier technicien à avoir gagné un grand tournoi dès sa première tentative.

Félix Sánchez Bas, le bâtisseur

Le projet qatarien a été forgé sous la conduite du technicien espagnol arrivé au Qatar en 2006 pour rejoindre l'académie Aspire. Il a accompagné la progression de deux diplômés de l'académie devenus des joueurs phares de la sélection : Akram Afif et Almoez Ali.

Au bout de sept ans passés à Aspire, Sánchez prend en main les U-19, avec lesquels il s'adjuge le trophée continental grâce à des buts d'Afif et Ali. Nommé aux commandes de la sélection senior après le licenciement de l'Uruguayen Jorge Fosatti, il s'empare de la Coupe d'Asie en 2019 aiu terme d'une finale remportée face au puissant Japon.

Sánchez Bas a affûté ses troupes sous différentes latitudes : il a décroché un nul contre le Paraguay dans la Copa América 2019, accédé au dernier carré de la Gold Cup 2021 et atteint la troisième place de la Coupe Arabe. La Coupe du Monde soumettra à l'épreuve du feu une équipe que Sánchez Bas a construite pierre après pierre au fil de 15 ans de travail.