dimanche 10 novembre 2019, 12:31

Müller, vision réduite et horizon élargi

  • Matthias Müller est atteint d'une anomalie génétique qui réduit sa capacité visuelle à 10%

  • Fan du FC Liverpool, il joue au SC Aadorf

  • "Des expériences négatives ? Pas le moins du monde !", assure-t-il

Müller Müller est atteint d'achromatopsie, une anomalie génétique qui réduit sa capacité visuelle à 10% et se manifeste par une absence totale de vision des couleurs. Suffisant pour renoncer au football ? Hors de question pour Matthias, aujourd'hui 25 ans, qui s'affilie à l'âge de 12 ans au club du SC Aadorf et évolue dans plusieurs équipes de jeunes avant d'intégrer l'équipe première.

"Mon meilleur souvenir sur le terrain, c'est mon premier but, ou mes deux premiers buts, en équipe première", confie Müller à FIFA.com. "Il m'a fallu beaucoup de temps pour m'habituer au rythme et lorsque j'ai inscrit mon premier but, tout le monde m'a félicité. Même les spectateurs, avec lesquels nous n'avons pourtant pas beaucoup de contacts. Une semaine après, je recevais encore des félicitations. L'ensemble du club s'est réjoui de me voir inscrire ce premier but. J'ai alors réalisé à quel point le club appréciait de me voir pratiquer ce sport."

L'achromatopsie en bref

  • Maladie rétinienne très rare d'origine génétique

  • Les personnes concernées souffrent d'une absence totale ou partielle de vision des couleurs

  • Capacité visuelle réduite, entre 5 à 15% seulement de l'acuité visuelle normale

  • Photophobie intense - En plein soleil, le patient atteint d'achromatopsie ne voit pratiquement rien

  • Les couleurs sont perçues comme des nuances de gris allant du noir au blanc

Ce qui semble aller de soi pour d'autres footballeurs pose de grands défis à Müller. "Quand je joue, la vitesse est bien sûr un énorme problème, et quand le ballon vient d'en haut, par exemple lors d'un dégagement ou d'un centre. C'est extrêmement difficile pour moi. Quand je regarde en l'air, je vois le ballon à la dernière seconde et je suis obligé de le laisser rebondir à côté de moi. Je préfère être servi en profondeur", explique l'ingénieur en mécanique, qui porte des lunettes teintées orange/rouge sur le terrain et en dehors pour protéger ses yeux sensibles à la lumière.

"Le pire, c'est quand le ciel est très lumineux et que le soleil brille. Je vois alors beaucoup moins bien que, par exemple, quand nous jouons le soir sous la lumière des projecteurs. Dans ce cas-là, il me suffit de ne pas regarder les projecteurs. Quand le ciel est couvert, cela fonctionne très bien."

Il ne lui est pas non plus toujours facile de distinguer ses coéquipiers de ses adversaires grâce à leur maillot, et il doit parfois identifier le joueur qui se dirige vers lui par ses chaussettes ou son short. Mais il n'y a pas que lorsqu'il est lui-même sur le terrain que Müller rencontre des difficultés. Son handicap visuel lui pose également problème pour suivre un match dans un stade. "La distance est le principal problème. C'est pourquoi je regarde toujours les rencontres avec des jumelles et je ne vois donc qu'une petite partie du terrain", explique le joueur du SC Aadorf. "Lorsqu'une équipe joue en rouge et l'autre en blanc, il m'est facile de les distinguer. Je connais tous les joueurs de Liverpool et leur emplacement sur le terrain, pareil pour l'équipe nationale suisse. Je parviens donc plus ou moins à les reconnaître."

Heureusement, Müller n'est pas confronté à des réactions négatives sur les terrains de football. Dans son entourage et au sein du club, tout le monde est au courant de son handicap visuel. "On me demande souvent après ou pendant le match pourquoi je porte des lunettes de soleil. C'est encore arrivé il y a environ deux semaines. Je l'explique alors rapidement." C'est aussi simple que cela.

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