jeudi 01 décembre 2022, 11:00

Deuxième point presse et nouvelles analyses du TSG

  • Le TSG a tenu un point presse après la fin de la deuxième journée de la phase de groupes

  • Les experts Cha Du Ri, Alberto Zaccheroni et Pascal Zuberbühler livrent leurs analyses

  • Par rapport à Russie 2018, moins d’incursions dans le dernier tiers adverse, et moins de un-contre-un

À première vue, le football, c’est toujours la même chose : deux équipes, 11 joueurs dans chaque camp, et deux objectifs communs: mettre le ballon au fond des filets adverses, et l’empêcher de franchir sa propre ligne de but. Mais c’est aussi toujours différent, chaque match ayant sa propre histoire et son scénario. Malgré le caractère unique de chaque rencontre, certaines tendances se dessinent selon les époques, et selon les compétitions. C’est précisément la mission du Groupe d’Étude Technique de la FIFA d’analyser ces évolutions. Pour leur deuxième point presse dans la Coupe du Monde de la FIFA, Qatar 2022, correspondant à la fin de la deuxième journée de la phase de groupes, les experts Alberto Zaccheroni, Pascal Zuberbühler et Cha Du Ri ont tiré de nouvelles conclusions après avoir analysé les matches de Qatar 2022, et avoir comparé les données recueillies avec celles de Russie 2018.

Après 50% des matches déjà joués, le TSG a ainsi noté que la longueur et la forme de l'équipe se sont légèrement ajustées depuis 2018. "Les blocs-équipes sont légèrement plus larges et légèrement plus courts dans leur longueur, c’est-à-dire dans la distance entre le défenseur le plus bas et l'attaquant le plus haut", précise Chris Loxston, Responsable du Groupe Analyse des Performances et Tendances de la FIFA. "En bloc bas, nous constatons une réduction de deux mètres de la compacité de la longueur de l'équipe. En 2018, les équipes ont défendu en profondeur et en étant très compactes. Aujourd’hui, la distance est même encore plus courte entre l'attaquant le plus haut et le défenseur le plus bas."

Des gardiens plus avancés et plus actifs

"Les distances sont assez étroites, les joueurs ne peuvent donc pas passer entre les lignes", confirme Zaccheroni, fort de sa longue expérience sur les bancs de touche. "L'objectif principal est que les attaquants soient toujours couverts par le positionnement des défenseurs. L'équipe est compacte tout en suivant la trajectoire du ballon. Et lorsque le ballon revient vers la ligne défensive, tous les joueurs se déplacent comme une unité. C'est similaire au type de bloc avec lequel nous avons vu la France remporter la Coupe du Monde en 2018. Ils sont excellents pour garder le contact serré, attendre dans leur propre moitié de terrain, puis presser agressivement." Autre changement tactique observé depuis l’édition russe : la position du gardien de but et la hauteur de la ligne défensive, notamment lorsque le ballon est dans le tiers défensif. Le portier est pratiquement un mètre plus haut, mais la hauteur de la ligne défensive est la même. "Ce n'est qu'un mètre, mais un mètre c'est énorme, surtout dans cette situation !", insiste Zuberbühler, qui a gardé 51 fois les buts de la Suisse. "Dans cette position, un mètre plus haut pour un gardien est crucial. Il joue haut et attend que le ballon soit joué en profondeur, par-dessus la défense, ou il attend que le ballon la contourne et il lit le jeu", précise-t-il, en s’appuyant sur l’exemple d’Édouard Mendy, le gardien du Sénégal, contre les Pays-Bas.

Ecuador v Senegal: Group A - FIFA World Cup Qatar 2022

"Les Néerlandais comment leur action de l’arrière et il est à l'extérieur de sa surface, à 23 mètres de la ligne défensive. Dans cette position, les gardiens sont performants dans cette Coupe du Monde. Ils lisent très bien ces ballons derrière leur ligne défensive", estime l’ancien dernier rempart de la Nati, qui apprécie également une autre tendance observée à Qatar 2022 par rapport à Russie 2018 : l’implication des gardiens dans la construction du jeu. “Au Qatar, les gardiens sont très impliqués. En 2018, les gardiens avaient effectué 443 offres de recevoir le ballon - c’est-à-dire montrer clairement qu’ils veulent le recevoir et où - alors qu’à ce stade au Qatar, ce chiffre est de 726. C'est une augmentation massive", ajoute-t-il, citant notamment l’Espagnol Unai Simon et l’Allemand Manuel Neuer en modèles. "C'est fantastique de voir que les gardiens de but soutiennent leur ligne défensive pour construire une action à l’extérieur et, encore plus, à l'intérieur de la surface."

Moins de prise de risque en un-contre-un

De l’autre côté du terrain, sur le plan offensif, les experts de la FIFA ont aussi noté des changements depuis 2018, à commencer par une diminution des pénétrations dans le dernier tiers du terrain. "Nous avons vu une réduction d'environ cinq par équipe - soit dix par match -, et généralement dans la zone centrale", détaille Chris Loxston. "La raison est que les défenseurs sont très compacts dans l’axe", avance Cha Du Ri, ancien international sud-coréen qui était aussi à l’aise au poste de latéral que d’ailier. "Le chemin le plus rapide vers le but est l’axe, donc les défenseurs se concentrent sur cette zone afin de ne pas donner d’opportunités. Beaucoup d'attaques partent donc des flancs. Et nous en sommes encore à la phase de groupe, donc les équipes préfèrent une approche prudente." C’est peut-être ce qui explique une autre tendance observée par le TSG : la réduction des situations de un-contre-un. Alors que ce nombre atteignait 10 par match en moyenne en Russie, il n’est plus que de 7 au Qatar.

France v Denmark: Group D - FIFA World Cup Qatar 2022

"Il peut y avoir plusieurs raisons à cela. D’abord, c'est la phase de groupes, donc les équipes ne veulent pas prendre de trop grands risques, Ainsi, dans des situations individuelles, on voit davantage de passes en arrière afin de conserver la possession", observe Cha Du Ri, avant d’évoquer les individualités. "Il y a moins de joueurs qui ont cette capacité. Nous voyons l'équipe anglaise, avec Marcus Rashford, ou française, avec Kylian Mbappé, des joueurs qui ont d'excellentes capacités pour créer des occasions à partir de situations de tête-à-tête. Mais beaucoup d'autres équipes n’ont pas ce type de joueur et choisissent de conserver la possession." Un avis partagé par Zaccheroni, qui aimerait que l’accent soit (re)mis sur cet aspect du jeu dans les écoles de football. "Les académies insistent davantage sur le jeu d'équipe que sur le jeu individuel. Mais les situations de tête-à-tête deviennent de plus en plus importantes dans le jeu", regrette le technicien italien.

"Parce que les équipes deviennent de plus en plus tactiques, et vous devez trouver un moyen de passer derrière la ligne et de créer un surnombre dans la surface. C’est pourquoi il est important que les centres de formation encouragent les jeunes joueurs à se lancer dans des situations individuelles", insiste l’ancien sélectionneur du Japon, en nommant Cristiano Ronaldo, Diego Maradona, ou Mbappé comme meilleurs exemples de talents individuels. "Leur principale qualité est la capacité de gagner en tête-à-tête, et cela vous donne l'avantage sur l’autre équipe", conclut-il.

Le TSG livrera une nouvelle analyse face aux médias à l’issue de la phase de groupes.