vendredi 16 octobre 2020, 09:22

Mabil-Sisto, de l'enfer des guerres jusqu'aux rectangles verts

  • Mabil et Sisto ont passé une partie de leur enfance dans des camps de réfugiés

  • Leurs familles ont fini par émigrer en Australie et au Danemark

  • Mabil évolue chez les Socceroos et Sisto chez les Danish Dynamites

"Au milieu de la difficulté, se trouve l'opportunité", disait Albert Einstein. Ce ne sont pas Pione Sisto et Awer Mabil qui diront le contraire. Originaires du Soudan du Sud, les deux hommes ont connu la guerre civile, une situation qui a contraint leurs parents à s’installer dans des camps de réfugiés au Kenya et en Ouganda. Après des années de privation, un programme humanitaire a permis à Mabil et à ses proches d’émigrer en Australie ; les Sisto, quant à eux, ont posé leurs valises au Danemark.

"Nous avions construit une hutte en terre qui faisait à peu près la taille d’une chambre dans une maison occidentale. Mais ce n’était pas vraiment chez nous. Nous vivions à quatre dans cet espace avec ma mère, mon frère et ma sœur. Une fois par mois, l’ONU nous distribuait de la nourriture", a expliqué Mabil à la BBC. "Chaque personne avait droit à un kilo de riz, soit quatre kilos pour toute la famille, et trois kilos de haricots. C’était très dur. Nous ne faisions qu'un repas par jour. Il n’y avait pas de déjeuner, ni de petit-déjeuner. Il fallait se contenter d’un dîner relativement modeste."

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À cinq ans, Mabil découvre le football en compagnie des autres enfants du camp. "C’était la seule chose à faire", poursuit l'actuel ailier du FC Midtjylland. "Depuis que je suis tout petit, j’ai toujours adoré le football. J’étais fan de Manchester United, mais il n’y avait qu’une seule télévision dans la région. Il fallait faire deux heures de voiture et payer un dollar pour y accéder. Quand je ne pouvais pas y aller, je demandais à un ami qui avait plus de chance que moi de me donner le résultat."

Malgré le succès, Mabil n’a jamais oublié d’où il venait. Il a créé sa propre fondation, Barefoot to Boots, et se rend régulièrement à Kakuma. "Je prends des chaussures, des choses pour jouer au football et des équipements sanitaires et je les donne aux réfugiés. Si j’ai deux semaines de vacances, j’en passe une ici et une autre avec ma famille."

Une guerre à fuir

Quant aux parents de Pione Sisto, la guerre civile qui a ravagé le pays entre 1985 et 2005 les a contraints à fuir en Ouganda avec leurs deux enfants, en 1994. Pione est né quelques mois plus tard. Toute la famille a alors entrepris un long voyage vers l’Europe du Nord, en quête d’un avenir meilleur.

"Au Soudan du Sud, nos parents avaient une petite ferme. Quand ils sont arrivés au Danemark, ils ont découvert un autre monde. Nous nous sentions parfois très seuls, en Afrique. C’est la raison pour laquelle nos parents ont toujours voulu nous protéger et nous guider", a confié Angelo, le frère de Pione.

Sisto a débuté sa carrière à Tjorring à l'âge sept ans, en 2002, avant de rejoindre le FC Midtjylland. Là, ses performances ont propulsé son équipe en UEFA Europa League. Après un séjour de quatre ans au Celta de Vigo, il est revenu dans le club où il s’était révélé.

Qatar 2022 en ligne de mire

Devenu citoyen danois, Sisto a déjà été sélectionné à plusieurs reprises en équipe du Danemark depuis 2015. Il espère goûter à nouveaux aux joies d'une Coupe du Monde de la FIFA, Qatar 2022™ après avoir pris part à Russie 2018.

Mabil rêve de l'imiter. Après avoir acquis de l’expérience au sein de plusieurs équipes professionnelles australiennes, le joueur du FC Midtjylland a reçu sa première convocation chez les Socceroos quelques mois après Russie 2018. "Je représente l’Australie car ce pays nous a donné une seconde chance, à ma famille et moi. J’ai passé la moitié de ma vie ici. C’est chez moi et je suis fier de défendre ses couleurs", avait-il affirmé à l'époque.

Il espère désormais prendre part aux préliminaires de Qatar 2022 et, peut-être, accéder à la phase finale. Un grand défi à relever, certes, mais qui n'a rien d'insurmontable compte tenu des obstacles qui se sont déjà dressés sur sa route.