jeudi 10 septembre 2020, 13:13

Faux rebonds et vraie passion à Eriskay

  • Le football joue un rôle important dans la vie de l'île écossaise d'Eriskay

  • Une exposition du Musée de la FIFA a fait connaître le terrain de foot

  • Le joueur-entraîneur d'Eriskay FC évoque les problèmes auxquels l'équipe doit faire face

On dit parfois que la perfection crée la beauté. Pourtant, les imperfections peuvent aussi être belles. Et un terrain accidenté situé sur une minuscule île écossaise des Hébrides extérieures en est bien la preuve.

Jusqu'à récemment, Eriskay - moins de 150 habitants - était connue pour son rôle dans le film des années 1940 "Whisky à gogo". Tirée d'une histoire vraie, cette comédie explique comment les insulaires ont sauvé des milliers de barils de la boisson nationale écossaise d'un bateau échoué sur ses côtes avant une lutte acharnée avec les douaniers.

Le seul pub d'Eriskay a pris le nom de ce vaisseau maudit, le SS Politician, un nom également floqué sur le maillot du club de football de l'île. Cette équipe, et le terrain sur lequel elle évolue, font depuis quelques années la renommée de l'île. Et aussi pittoresque est-il, le terrain n'est peut-être pas l'illustration parfaite de la perfection, comme l'admet le joueur-entraîneur d'Eriskay FC.

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"Le tiki-taka ici, ça n'existe pas"

"Les adversaires se plaignent à chaque fois", raconte Shaun MacKinnon à FIFA.com. "C'est vrai que ce n'est pas vraiment un billard. Il y a des bosses partout, une grosse pente dans un coin, et une moitié de terrain est plus haute que l'autre. Des moutons, des chevaux et des vaches s'y aventurent aussi parfois et utilisent le terrain comme toilettes, donc il faut ramasser tout ça... En plus, une rivière coule juste à côté et le terrain est ouvert à tous les éléments donc ça peut être très venteux et c'est parfois difficile de jouer au foot. Il faut adapter son jeu. Le tiki-taka, ici, ça n'existe pas !"

La saison se joue de la fin mars jusqu'au mois de septembre, donc la compétition a été cette année abandonnée à cause des restrictions liées au Covid. "C'est impossible de jouer sur ce terrain l'hiver", explique MacKinnon. "La moitié basse est complètement inondée et ça n'a jamais le temps de désengorger parce qu'il ne fait pas jour assez longtemps et il n'y a pas assez de soleil. Mais c'est comme une attraction touristique maintenant. Beaucoup de personnes prennent des photos du terrain ou des vidéos, et on a parlé de nous à la télé et dans quelques journaux. La couverture médiatique a été vraiment positive pour une île aussi petite que la nôtre."

La FIFA, et plus précisément le Musée du Football mondial de la FIFA, a joué un rôle important mais inattendu dans l'ascension d'Eriskay FC. En 2015, le musée de Zurich choisit de faire figurer la petite île écossaise dans son exposition "Planète Football". On y voit des vidéos de l'équipe et du terrain bosselé, parmi d'autres lieux atypiques, comme un terrain dans le désert du Maroc ou sur une plage au Brésil.

"Ça a permis de nous faire connaître", admet MacKinnon. "Notre fierté a toujours été présente. C'est ancré dans nos gênes à partir du moment où on peut taper dans un ballon. Mais le football dans ce genre d'endroit a beaucoup plus d'importance que dans le reste du pays. J'ai habité à Glasgow pendant quelques années et j'ai joué amateur là-bas, mais ce n'était qu'un hobby. Ici, on représente son île et l'équipe tient un rôle important au sein de la communauté."

Empêcher la catastrophe

Malheureusement, alors qu'Eriskay FC a vu le jour à la fin des années 1950 et que le club occupe une place particulière dans la vie de cette île, son avenir est loin d'être assuré. En plus d'avoir une population minuscule, celle-ci commence à prendre de l'âge, ce qui a toujours désavantagé le club dans des compétitions contre des équipes en provenance d'îles voisines beaucoup plus grandes. Aujourd'hui, cependant, le principal problème pour MacKinnon consiste à trouver suffisamment de joueurs pour simplement préserver le football sur Eriskay pour les générations à venir.

"Ce n'est pas toujours facile de produire un 11 de départ parfois", avoue-t-il. "Si j'arrive à avoir 13 joueurs ensemble pour un match, je suis content. Quand j'arrêterai d'être entraîneur, on ne me jugera pas sur la réussite de l'équipe, mais sur le nombre d'années où j'ai réussi à monter une équipe. C'est un gros problème et c'est de plus en plus dur parce que peu de jeunes arrivent ici. Malheureusement, si rien ne change, l'équipe pourrait disparaître dans quelques années. Ce serait une grosse perte pour notre île. Nous allons tout faire pour empêcher cela", conclut MacKinnon.

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